JARDINS ANGLAIS DE FRANCIS PEETERS & GUY VANDERSANDE

On sait que l’Angleterre est la référence en matière de jardins et que les Britanniques ont influencé le monde entier par leur savoir-faire lentement tissé au fil du temps. Cela commence au XVIème siècle avec le style Tudor. C’est sur cette référence que se sont appuyés l’historien de l’art Francis Peeters et son ami l’architecte paysagiste Guy Vandersande. Les Editions Ulmer leur ont laissé libre cours et ils s’expriment avec la plus grande liberté. Alors ne boudons pas notre plaisir et suivons ces voyageurs dans le temps et dans l’espace sur les 250 pages du livre « L’Angleterre des jardins » publié en octobre 2021.

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Jardins, jardiniers et architectes paysagistes qui ont marqué l’histoire. La liste de noms qui va suivre évoquera pour les amateurs de jardins des souvenirs de visites et des lectures. Pour s’exprimer avec tant de brio, nul doute : Francis Peeters a beaucoup vu, lu, conférencé… et son avis tranche parfois, pouvant même paraitre définitif, voire excessif. On prendra connaissance avec intérêt de ce livre d’auteur qui nous guide à Hampton Court, Levens Hall, Castle Howard, Powis Castle, Rousham, Stowe, Blenheim, Stourhead, Sezincote, Chatsworth, Gravetye, Hestercombe, Sissinghurst, Hidcote, Nymans, Great Dixter, Longstock, The Garden House. Et nous fait rencontrer Capability Brown, Joseph Paxton, William Robinson, Gertrude Jekyll, Harold Peto, Beth Chatto, les Bloom de Bressingham, Christopher Lloyd, Piet Oudolf, Keith Wiley, Tom Stuart-Smith et quelques autres.

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William Kent (1685-1748), avec son oeuvre paysagiste de Rousham, permet à Francis Peeters de développer un avis personnel. D’origine modeste du Yorkshire, le jeune Kent est un apprenti en peinture et il décore les carrosses. Il est repéré par un peintre de Londres qui réussit à l’envoyer en 1709 en Italie pour une dizaine d’années, au même titre que les jeunes gens de bonnes familles font le « Grand Tour » pour parfaire leur éducation. Il n’a pas le sou mais se distingue comme conseiller artistique auprès de ceux qui ont la fortune pour acheter des oeuvres en Italie. Sa bonne humeur et sa conviction l’ont fait travailler pour une large palette de commanditaires comme Lord Burlington et la famille royale, surtout la reine Caroline pour qui il dessine des appartements. Pour Peeters, William Kent n’est pas un grand paysagiste. La visite de Rousham en est la preuve tangible. Elle se conçoit plus volontiers comme une succession de tableaux, de scènes théâtrales savamment orchestrées par l’éducation classique de son auteur. Il veut le considérer comme un scénographe talentueux, ce qui laisse d’ailleurs entendre son habilité pluridisciplinaire.

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Si les jardins du XVIII° siècle sont modelés par des philosophes et des poètes, ceux du siècle suivant sous la houlette de marchands et d’industriels se veulent pragmatiques, voire didactiques comme le souligne Francis Peeters : « Si vous étiez riche, il fallait un jardin extravagant, aux parterres de centaines de plantes annuelles renouvelées deux fois l’an et qu’entretenait une bande de trente jardiniers à demeure ». Le renouvellement floral victorien consomme des plantes en grande quantité choisies parmi les pélargoniums multicolores, sauges rouges, héliotropes pourpre, calcéolaires jaunes. Ce style envahit toutes les classes sociales, jardins grands et petits, privés et publics. Waddeston Manor est cité en exemple. C’est l’oeuvre du baron Ferdinand de Rothschild qui fait construire une sorte de château de la Loire dans le Buckinghamshire, avec un parc à la mesure et 60 jardiniers pour l’entretien. La photo de cette tondeuse à traction animale est une belle illustration d’une époque où pour les jardins rien n’était impossible !

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Présentation de la perle rare Sezincote, façonnée au coeur de la belle région des Cotswolds pour Charles Cockerell qui revient du Bengale par son frère architecte. Il lui demande de construire une maison qui lui rappelle l’Inde qu’il aime tant. Alors la demeure prend la forme d’un palais des mille et une nuits, en s’inspirant de l’architecture moghole du Rajasthan. Construction qui amusa beaucoup le roi George IV pour construire le palais de Brighton. Les jardins de Sezincote ont été restaurés au XX° siècle avec une belle collection d’arbres et d’arbustes parfaitement choisis qui habillent à merveille l’esprit des lieux.

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XIX° siècle : la Grande Epoque des Collectionneurs. Après avoir travaillé l’architecture, puis les décors à base de couleurs variées fournis par des plantes à fleurs, les collectionneurs envoient sur les nouveaux continents des armées de « chasseurs de plantes », « plant hunters » en anglais. Quelques noms connus de tous au Royaume-Uni sont toujours hyper-célèbres. Joseph Banks, par exemple, premier directeur du jardin botanique de Londres « Kew garden » qui utilisa son immense fortune à l’introduction de nouvelles plantes. Plus de mille rien que dans l’expédition à Tahiti aux côtés du capitaine Cook. On évoque aussi la firme Veitch d’Exeter, entreprise familiale qui démarre en 1808 et qui commandite elle-même ses propres explorateurs, tels Thomas Lobb et David Douglas.

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Great Dixter, un phare exquis du XX° siècle, où apparait le nom de Christopher Lloyd, sur lequel on pourrait écrire un roman. (portrait ci-dessous en 2005, par Georges Lévêque, un an avant son décès). Le canevas de base des lieux est on ne peut plus traditionnel et il respire le Mouvement Arts & Crafts avec une maison construite vers 1910 par l’architecte Edwin Lutyens. La propriété faussement médiévale nous plonge d’étrange manière au milieu du XV° siècle. Les topiaires à l’allure de paon figé ne sont pas l’oeuvre de Christopher mais de son père qui trouvait là un passe-temps agréable. Le futur de Great Dixter réservera de belles surprises car la continuité est assurée par Fergus Garrett, bras droit de « Christo » pendant quinze ans. Une suite qui ne sera pas figée car Fergus, fidèle à son mentor, porte chaque saison sur le jardin un regard nouveau. Great Dixter est un laboratoire d’idées.

Christopher Lloyd de Great Dixter

Photo ci-dessous. Trois générations de la famille Messel ont occupé Nymans, propriété de 240 hectares aux vues spectaculaires sur la campagne du Sussex, jusqu’à ce que la maison brûle entièrement en 1947. Elle ne fut jamais reconstruite à l’identique mais seulement partiellement restaurée. Les jardins qui l’enveloppent sont spectaculaires, renommés et visités chaque année par beaucoup de monde. Photo de Georges Lévêque.

Photo tout à fait en bas. Voici Stowe, photographié par Georges Lévêque sous un angle différent de la photo de couverture du livre. C’est un haut lieu de l’Art des Jardins anglais dont l’histoire est contée avec culture et brio par Francis Peeters dans le chapitre consacré à Capability Brown.

Nymans

http://www.editions-ulmer.fr/editions-ulmer/l-angleterre-des-jardins–806-cl.htm
30 euros octobre 2021

Stowe le pont palladien