ECOLOGISTE, MÊME APRÈS LA MORT !

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photos du livre par Serge Lapouge essentiellement
portrait de Gilles Clément Georges Lévêque

« Les paysages funéraires racontent une histoire, une vision du monde ». Ainsi s’exprime Gilles Clément, paysagiste bien connu et tout autant homme de lettres, penseur, conférencier et enseignant. Et d’aligner quelques phrases qui résument le regard des civilisations anciennes et actuelles : « L’absence de sépulture architecturale concerne les sociétés anciennes où l’on procédait aux véritables enterrements. Mis en terre, le corps se décompose et disparait. Elle concerne aussi notre époque pour ceux qui préfèrent disséminer les cendres issues de l’incinération des corps plutôt que de construire un bâtiment destiné à les accueillir. Pour le reste des humains, la mort laisse une trace en dur, un lotissement cadastré, une ville à part, on appelle cela un cimetière : du grec koimêtérion, le lieu où l’on dort. » Il amorce ainsi une réflexion qui sert de préface à un nouveau livre bien singulier dans son genre. Rien que le titre est surprenant : « Funérailles écologiques ». Faut-il y voir une technique de marketing ou bien l’amorce d’une réflexion nouvelle ?

L’éditeur, Terre Vivante, en apposant sur la couverture une pastille qui déclare que nous sommes en présence d’un « Guide de survie en milieu funéraire » lance le débat. Chacun pensera ce qu’il voudra mais il faut bien avouer qu’après avoir parcouru ce livre de plus de 250 pages abondamment illustré, un constat s’impose. Nous sommes en présence d’un ouvrage très sérieusement traité qui ouvre une brèche dans la réflexion. C’est quand nous sommes vivants que nous devons décider du chemin que prendra notre dépouille mortelle et réfléchir à de nouveaux usages vis à vis du lieu qui les reçoit.

Les auteurs Brigitte Lapouge-Déjean et Laetitia Royant évoquent les lois du marché des Pompes Funèbres qu’elles qualifient de lucratives et comment réduire les coûts qu’elles génèrent. Ceci concerne le volet financier. Elles abordent ensuite les réglementations des cimetières qui sont laissées en grande partie à l’appréciation des communes. Un argument nouveau va bouleverser assez vite leur gestion. Il s’agit de la loi Labbé, remarquent-elles : « une loi zéro phyto pour la mise en place d’un objectif zéro pesticide » applicable depuis le 1er janvier 2017. Profitant de cette révolution de pensée et de plan de gestion, de plus en plus de villes ne se contentent pas d’y tolérer des allées reverdies. Elles imaginent un changement radical pour faire de ces lieux de mémoire des espaces verts presque comme les autres.

Avant d’aborder les changements essentiels qu’elles imaginent, elles passent en revue les lois et usages du passé. Puis elles partent à la découverte de quelques lieux de sépultures qu’elles proposent comme modèles à suivre. Elles pointent Boissiérette dans le Lot et Nantes où le cimetière moderne Toutes-Aides laisse l’herbe épouser le marbre ou la pierre des tombes. Quand tant de communes font exactement le contraire, où les employés en charge de la « propreté » éliminent avec ponctualité le moindre paturin et la moindre fleurette qui tenteraient de vivre sur un gravier copieusement arrosé de désherbant jusqu’à la veille de l’application de loi. La révolution verte écologique est en marche, même dans les cimetières, sommes-nous en droit d’espérer.

Funérailles écologiques, octobre 2017, 25 euros
www.terrevivante.org

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