Le musée des Beaux-Arts de Tours, installé dans l’ancien palais des Archevêques, figure parmi les sites majeurs du Val de Loire. Ses collections renommées, notamment un exceptionnel ensemble de Primitifs italiens, en font un des plus riches musées de France. Monument historique, le musée est constitué d’édifices qui se sont succédés de l’Antiquité au 18ème siècle, dont tours et remparts gallo-romains. Ses souterrains, construits avec des remplois de nombreux édifices de la ville antique (frises, fûts de colonnes, entablements…) abritent la plus belle inscription lapidaire à la gloire des Turons « Civitas Turonorum Libera » pour témoigner que la cité de Turons bénéficiait d’un statut de liberté. Et c’est en ce lieu que vient de commencer une exposition qui durera jusqu’au 4 janvier intitulée « Immortels, Petits arrangements avec la mort » dont voici cinq peintures.
Il faut profiter de cette exposition « de poche », pour reprendre les mots fournis par le musée, pour visiter bien sûr l’ensemble des étages et des salles avant de s’enfoncer dans la pièce réservée aux oeuvres liées à la fin de vie selon trois thématiques : La mort dans la mythologie et la religion catholique, la garde du souvenir par devoir de mémoire et l’illustration des tombeaux et catafalques. Ouvert tous les jours sauf les mardis : http://www.mba.tours.fr/actualite/338/82-immortels.-petits-arrangements-avec-la-mort.htm
La Résurrection de Lazare, vers 1750, par Franz Christophe Janneck, huile sur cuivre. La résurrection de Lazare est le dernier miracle de Jésus. Appelé par Marthe et Marie, soeurs du défunt, Jésus ramène Lazare de Béthanie à la vie quatre jours après son enterrement. Dans une mise en scène très théâtrale, le mort, livide, se redresse dans son tombeau, les deux mains attachées par des bandelettes et le suaire le couvrant à demi. Ce miracle est l’un des plus populaires de l’art chrétien car il est considéré comme un gage de réalité de la résurrection de tous au moment du Jugement dernier.
Vanité, XVIIème siècle, France, huile sur toile de la Collection Cathelineau acquise en 1858. Une vanité est une catégorie de nature morte dont la composition allégorique suggère que l’existence terrestre est vide, vaine et la vie humaine de peu d’importance. Le genre naît dans les années 1620 aux Pays-Bas, dans une atmosphère religieuse et intellectuelle marquée par un sentiment de précarité. Le monde parait alors instable, frustrant et les artistes vont chercher à exprimer la fragilité de l’homme. Le terme est inspiré d’une citation de la Bible (Ecclésiaste) « Vanité des vanités, tout est vanité ». Les pièces d’orfèvrerie, le verre à vin, les livres, la partition musicale, le luth retourné évoquent la futilité des possessions terrestres.
Le Moine fossoyeur, 1867, par Alphonse Muraton, huile sur toile. Don de l’artiste en 1868. Ce tableau de grand format (220 x 149 cm) est une des oeuvres les plus célèbres de l’artiste tourangeau. Après l’Ecole des Beaux-Arts de Paris, Muraton revient dans sa ville natale à l’âge de 30 ans pour y faire carrière. Et entre 1867 et 1869, l’artiste s’illustre au Salon par plusieurs scènes religieuses inspirées par la peinture espagnole qui nous place face à l’éternelle interrogation de l’Homme devant le mystère de la mort. La pose du moine n’est pas d’ailleurs sans rappeler le célèbre Penseur de Rodin, de 1903. On peut y voir aussi le témoignage d’une pratique funéraire aujourd’hui abandonnée : l’enterrement des défunts à l’ombre de la croix, près des églises, dans l’espoir de renaître plus vite au Paradis.
Chambre mortuaire de Gambetta, copie dans les mêmes dimensions par G. Cordier, d’après une huile sur toile de Jean-Charles Cazin. Acquise par Tours en 1925. Léon Gambetta fut une personnalité importante de la IIIème République. Sa mort, à son domicile de Sèvres en 1882, crée une vive émotion. Comme il est d’usage à l’époque lors du décès d’un « grand homme », artistes et photographes se succèdent pour garder un souvenir de la chambre du défunt. Proche de Gambetta, le peintre Jean-Charles Cazin immortalise ainsi la chambre après la levée du corps. Le lit défait et le drapeau couché parlent du vide, du deuil, de l’abandon.
Eugène Bossard sur son lit de mort, 1880, par Ferdinand Pitard, huile sur toile. Eugène Bossard, Peintre formé à l’Ecole des Beaux-Arts de Tours, Eugène Bossard meurt à l’âge de 27 ans alors qu’il prépare le concours pour le Prix de Rome. Ferdinand Pitard qui l’a sans doute rencontré dans le milieu artistique tourangeau brosse son portrait sur son lit de mort. Dès le XVIème siècle, la pratique du « dernier portrait » consiste à fixer les traits du défunt, soit sur son lit de mort soit dans son cercueil, afin de garder un ultime souvenir. Le masque mortuaire, l’image peinte ou photographiée, reste le plus souvent dans le cercle familial ou amical. Les oeuvres produites montrent le plus souvent une image apaisée de la mort. Et les défunts paraissent presque toujours plus jeunes, comme idéalisés. Ils semblent dormir.
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