LA DERNIERE CROISADE DU PAYSAGISTE GILLES CLEMENT

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Gilles Clément a repris la plume pour dénoncer cette angoisse injustifiée qui a poussé les services du Ministère de l’Agriculture à interdire la vente et la dissémination de ces plantes qu’on qualifie d’envahissantes. Pour qui ignorerait Gilles Clément, voici un bref cv. Ce jeune homme de 70 ans est un paysagiste célèbre en France ainsi que bien ailleurs car il a beaucoup voyagé. Il a fait le tour du monde à plusieurs reprises autant pour ses études personnelles que pour ses créations. Son nom est associé à beaucoup de jardins, jardins publics particulièrement.

A Paris, le Parc André Citroën l’a projeté il y a une trentaine d’années aux yeux du grand public puisqu’il fut le premier paysagiste à défendre l’idée de pelouses sur lesquelles on pourrait marcher, dormir et même pique-niquer. Ses prises de position vis à vis de la flore spontanée que tant de gens nomment « mauvaises herbes » ont été admirables, voire courageuses à l’époque. Qui n’a vu dans sa propre ville l’employé municipal déverser des herbicides poison sur de malheureuses touffes de chiendent ou de chardons ! Sait-il qu’il déverse des molécules dangereuses pour l’animal et pour l’homme ?

Très doué pour la communication, servi par une voix douce et des propos brillants, Gilles Clément est fort apprécié en tant qu’enseignant et conférencier. Si l’on ajoute la somme de livres qu’il a écrits, on peut dire de lui que c’est un homme complet. A l’époque des Encyclopédistes, nul doute ! Diderot et d’Alembert l’auraient invité à leurs travaux. Ses interventions sur le Domaine du Rayol et du Musée du Quai Branly l’ont hissé aux premières places de sa profession. L’homme jardine personnellement depuis son adolescence et a accumulé plus de cinquante ans d’observation. Son jardin creusois « La Vallée » près de Crozant lui a permis de mettre au point différents concepts. Celui qu’il a nommé « Le Jardin en Mouvement » est le plus célèbre.

Gilles est donc devenu un défenseur de la flore, spontanée comme sub-spontanée, la première étant installée sur notre sol depuis toujours, l’autre s’étant fixée plus tardivement par le truchement des hommes qui rapportaient des plantes inconnues de leurs voyages . Certaines d’entre elles ont trouvé chez nous des conditions de vie tellement parfaites qu’elles ont pu proliférer, au point parfois de bousculer et prendre la place de celles qui s’y trouvaient avant. D’où une menace et le mot créé pour l’occasion. On parle alors de « plantes invasives ».

Pour chaque plante nouvelle introduite on avait l’habitude de s’extasier sur ses capacités à s’installer sur de nouveaux territoires. Ce fut jadis le cas de l’aillante et du buddleja, arbustes pionniers qui eurent tôt fait de coloniser la plupart des friches et des sols bouleversés par de gros travaux. On a dit la même chose quand les jardins décoratifs du 19ème siècle ont introduit les premiers bambous et plus tard l’immense balsamine de l’Himalaya. Ces pures beautés sont exquises par leur allure, mais elles grignotent l’espace, l’accaparent et condamnent les autres végétaux à disparaitre. Même schéma pour la grande berce du Caucase (Heracleum manteggazianum) aux vastes ombelles de fleurs, véritable oeuvre d’architecture, qui produit des milliers de graines fertiles. C’est l’envahisseur par excellence dont il faut craindre aussi les poils urticants qui brûlent la peau. Et la jussie (Ludwigia grandiflora), jolie parure sur l’eau des rivières et des étangs capable d’éliminer toute autre vie végétale.

La liste des végétaux aux capacités expansives semble croître. Cela a conduit les Pouvoirs publics à interdire ou contrôler la culture des espèces les plus menaçantes. Gilles Clément s’est associé à Brigitte Lapouge-Déjean pour venir au secours de ces plantes à mauvaise réputation. Ils proposent dans leur livre « Plantes envahissantes, pionnières ou simplement expansives » de vivre en intelligence avec elles en les tenant à distance raisonnable de manière écologique plutôt que les faire disparaître à tout prix. Car dans la destruction radicale, il faut entendre désherbage chimique qui présente un danger autrement plus important, un peu à la manière des gens qui voudraient tuer les mouches posées sur les carreaux d’une fenêtre à coups de marteau. Ce livre est une réflexion rafraîchissante dans un monde de folie. Voici quelques plantes dont il est fait état dans ce joli opus à lire et recommander : cortaderia dite herbe de la pampa, bambou, solidago dit verge d’or, rhododendron, figuier de Barbarie, agave, coquelicot.

Plantes envahissantes, pionnières ou simplement expansives, 25 euros.

www.terrevivante.org

ISBN : 978-2-36098-130-4

www.gillesclement.com

LA BRETAGNE : L’AUTRE PAYS DES RHODODENDRONS

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Sous la conduite attentive de Noélie Blanc-Garin, Chargée de mission culturelle, la découverte du Domaine de Trévarez tient de la magie. Les brouillards du matin dissipés, le soleil printanier fait vibrer les couleurs. Et quelles couleurs ! C’est plus de 80 hectares de parc et de bois où tout le monde à accès, contre 20 euros si l’on achète le pass annuel. Un véritable cadeau fait par l’Etablissement public « Chemins du Patrimoine en Finistère » !

Tout incite à visiter Trévarez pour un amateur de jardin, à partir du 1er mars et après un repos de huit semaines pendant lesquelles on mène à bien les gros travaux d’entretien. Seulement les après-midi. Sauf en juillet-août où les grilles s’ouvrent à 10 heures. Mars en Bretagne, c’est déjà la floraison des camélias, ceux-là même que Noël Yézou, éminente personnalité de la Bretagne agricole, avait fait planter dans les années 1960-70 lorsque le domaine était à l’abandon après les bombardements anglais de 1944 sur les troupes allemandes qui avaient réquisitionné le « Château rose », appelé ainsi du fait de ses parements de briques rouges rosissant dans le soleil du soir.

Tous les arbustes de terre acide se plaisent à Trévarez ! Au point que les rhododendrons « pontiques », même s’ils sont des hybrides étrangement similaires, dépassent en hauteur des maisons de deux étages. Les plus anciens sont centenaires. Ils forment des fourrés denses qui se transforment en nuées mauves entre la mi-avril et la fin de mai. « Une peste dit le jardinier-en-chef, si on les laissait sans contrôle ils engloutiraient l’espace, année après année » ! Peste délicieuse s’il en est fait remarquer le visiteur qui se moque de cette considération car uniquement soucieux de la beauté visuelle de ces arbustes forestiers. Des lots d’azalées aux tons plus chauds s’avancent sur la grande pelouse qui fait un lien humanisé entre bois et château. Ce dernier, restauré à la légère durant ces vingt dernières années, présente des souvenirs de l’art de vivre 1900, c’est à dire du temps où le créateur du domaine, l’aristocrate James de Kerjégu, puis sa descendance, invitaient les amis à de mémorables chasses à courre. Les invités qui avaient la chance d’être hébergés au château pouvaient apprécier les fastes de la modernité puisque les salles de bains et le chauffage central étaient déjà la norme à Trévarez.

Un regain de couleur bleu ardoise teinte des surfaces immenses lorsque en été les hortensias rivalisent de beauté et de puissance par leurs somptueuses floraisons. Des hectares de fleurs vous attendent donc dans quelques semaines à Trévarez. Le bois est sillonné par un réseau de sentiers accueillant où il fait bon se promener et profiter du grand air. Les picnics sont tolérés sur l’ensemble du domaine. Parkings généreux pour voitures et autocars.

Domaine de Trévarez
29520 Saint Goazec
02 98 26 82 79
www.cdp29.fr
le pass annuel donne un libre accès à l’ensemble des lieux gérés par Chemins du Patrimoine en Finistère

pour bien dormir à proximité :
B&B « Au fil de l’Aune », Patricia Louedec, 17 rue Jean Dorval à Châteauneuf du Faou. 02 98 99 78 41

pour bien déjeuner ou diner à proximité :
restaurant « La Blanche Hermine », 1 place Charles de Gaulle à Pleyben. 02 98 26 61 29