LES NOUVEAUTÉS DU JARDIN QUI FONT L’ACTUALITÉ

IMG_4374

Pour les récentes journées des plantes de printemps à Chantilly, les organisateurs sont satisfaits d’avoir dépassé la barre des 30.000 visiteurs. Rappelons que ces journées font suite à celles de Courson, deux fois l’an et sur trois jours, en mai et octobre.

Les fortes averses du jeudi soir avaient eu le pouvoir de chasser la poussière provoquée par les allées et venues des camions qui, dans leurs norias habituelles, déposent bacs, pots et plantes pour garnir les quelques 200 stands qu’il faut installer. Pluie bénéfique donc, substantielle pour un arrosage efficace et mesurée tout de même puisque les nombreux rosiers en pots exposés au meilleur de leur floraison n’ont pas perdu tous leurs pétales colorés qui font le bonheur de qui les regarde.

Chaque année propose un thème autour duquel les exposants doivent broder. Cette fois, très facile puisque on se devait de « Jardiner en technicolor ». Les couleurs, ce n’est pas ce qui fait défaut dans un jardin. Le talent dont il fallait faire preuve était plus de les associer avec finesse que de les multiplier.

Le Prix du Domaine de Courson a la responsabilité de remarquer la présentation qui fait corps avec le thème de la manière la plus évidente. Ce prix a été partagé ex-aequo entre la pépinière belge Beverlei pour sa composition de rhododendrons et azalées de couleurs douces et chaleureuses, aux nuances pourpre, roses et parme et une pépinière italienne dont c’était la première participation. Oscar Tintori présentait essentiellement des agrumes, c’est à dire toute sa collection d’oranges, citrons, pamplemousses et autres espèces de Citrus. Fruits accrochés sur les branches d’arbustes qui avaient fait le voyage et fruits en présentation dans des assiettes, des paniers et aussi sous la forme de confitures que les visiteurs pouvaient goûter. Gros succès !

A l’occasion de ces journées, plusieurs jurys mettent des plantes en lumière et leur accordent des mérites ou bien des recommandations. Ce sont toujours des plantes cultivées en pot afin de pouvoir être présentées sur le podium qui leur est dédié, avec panneau explicatif qui reste les trois journées en place. Voici une sélection de celles-ci, accompagnée des descriptions fournies par le service de presse de Chantilly.

Rhododendron ‘Cannon’s Double’. Cet arbuste caduc très vigoureux et rustique greffé sur R. luteum, originaire d’Amérique du nord, est remarquable pour sa fleur double en trompette d’un blanc-rosé, au cœur jaune qui illuminera et parfumera le jardin en avril-mai. Son feuillage lustré vert foncé et pourpre devient rouge clair et bronze à l’automne. On le plantera à la mi-ombre ou à l’ombre, en terre acide, fraîche et bien drainée. Il est de petite taille (H 1,6 m x l 1,4 m) et crée un élément très décoratif dans un massif ou en situation isolée. Présenté par Le Portail Enchanté.

Clematis ‘Miranda’. Les fleurs étoilées bleu foncé, nuancées de nervures, de cette clématite sélectionnée en Grande-Bretagne par Barry Fretwell en font une sarmenteuse élégante. Sa rusticité (- 15°) s’adapte à tout sol, au soleil ou à mi ombre. Sa petite taille (H 2 m x l 1 m) et sa floribondité dense et étalée feront merveille adossées à un arbuste, dans un massif de vivaces et même en pot. On pourra aussi la laisser courir sur le sol. Présenté par Cerdys.

Lonicera hildebrandiana. Cette rare espèce de chèvrefeuille géant originaire des lisières des forêts chinoises (Yunnan) a séduit le jury. Sa floraison spectaculaire par la taille de ses fleurs (20 cm) est très parfumée et évolue du blanc pur à un jaune orangé avant de s’éteindre. Son feuillage persistant à semi-persistant nécessite un support solide pour retenir ses ramures de plusieurs mètres (jusqu’à 10 m). Semi-rustique, il devra être paillé et supportera d’être rabattu si on le rentre en serre. Il préfère un sol riche et drainant et une exposition ensoleillée. Présenté par la pépinière Nature & Tropiques.

Acer shirasawanum ‘Moonrise’. Ce petit érable greffé sur Acer palmatum au port compact et arrondi est issu d’un semis découvert par Carl Munn dans l’Oregon (USA.) Son exceptionnel feuillage printanier rouge-carmin prend une couleur vert chartreux et jaune en été pour devenir rouge à l’automne. Cet arbre (H 2 à 3 m x l 2 à 3 m) bien rustique est à planter en terre acide drainée, au soleil ou à la mi-ombre, éventuellement sur une terrasse dans un bac adapté. Présenté par la Pépinière belge de Benoît Choteau.

IMG_4407

« AVEZ-VOUS VISITÉ LE JARDIN DU DOCTEUR FAVIER ? »

IMG_4000

Cherbourg, ville portuaire ancrée à l’extrémité du Cotentin, a la réputation d’offrir un climat doux. Le Gulf-Stream baigne sa côte ouest en apportant des brumes et des températures qui l’hiver s’aventurent rarement en dessous de zéro. Climat doux et humide, lit-on dans les livres de jardinage, voici l’idéal pour planter des jardins à l’anglaise avec des témoins des flores méditerranéennes et aussi chiliennes, néo-zélandaises, enfin tout ce qui fait rêver le jardinier en recherche de beautés rares et d’émotion.

Parc de la Roche Fauconnière
« Avez-vous visité à Cherbourg le jardin du docteur Favier ? » avait-on coutume d’entendre dans les cercles jardiniers-botanistes il y a déjà quelques dizaines d’années. Bien que très discret et plutôt secret, Charles Favier prolongeait avec fougue l’oeuvre de trois générations de Favier, l’aménagement sur plusieurs hectares d’une collection de végétaux pas ou peu rencontrés, fortement teintée d’exotisme en raison du climat de la presqu’ile cotentinoise. La documentation disponible fait remonter à 1869 l’histoire du jardin. Qu’on l’ait visité ou pas, l’endroit était connu du petit monde de la botanique et aussi des « têtes couronnées ». Un document d’époque précise en effet que, après la guerre de 1939/45, des gens d’importance à l’instar de la reine de Hollande et la reine de Danemark venaient visiter les plages du débarquement et … le Jardin Favier. Ce dernier était des plus faciles à trouver en raison de son positionnement à côté d’un énorme château d’eau posé sur un des points hauts de la ville et visible d’à peu près partout. Puis le temps a passé. Charles Favier est mort dans les années 1990. Son fils Alain a prolongé l’effort un moment et la génération suivante n’a pas suivi. Un jardin oublié, sans surveillance, sans entretien se laisse assez vite envahir par les ronces et les visiteurs indélicats. Victime de vandalisme et d’incendie, la belle maison de briques rouges a cessé d’être habitable. Reste le nom du jardin maintenant : Parc de la Roche Fauconnière, nom donné par les Favier à cet ensemble de 7 hectares, dont 4 classés aux Monuments Historiques depuis 1978, un réservoir unique qui comptait plus de 4000 espèces de plantes vivaces, d’arbres et d’arbustes identifiés pour la plupart.

Par une politique volontariste dans le domaine des Espaces Verts, la ville de Cherbourg vient de décider de reprendre l’entretien du jardin Favier, assuré un temps par une association de jardiniers bénévoles. Régine Bésuelle, conseillère municipale en charge des jardins de la ville, a réuni la presse et les élus pour expliquer la démarche : « Cherbourg-en-Cotentin a proposé de reprendre l’entretien du jardin qui appartient depuis 2011 au Conservatoire du littoral et des rivages lacustres. » Les travaux de restauration ont commencé sous la surveillance attentive de Franklin Picard, un botaniste très compétent qui fut un ami de Charles Favier et qui occupe des responsabilités au sein d’associations internationales de botanique. Des visites guidées suivront sous la houlette le plus souvent de Dominique Poirier, l’actuel directeur nature, paysage et propreté de la ville. Renseignements en mairie.

Etre en visite à Cherbourg est l’occasion de découvrir les nombreux parcs et jardins de la ville, publics ou privés. En ville, deux sont des étapes obligées :

Château des Ravalet
A partir de 1872, un parc de 14 hectares se développe en grande partie à l’anglaise mais aussi à la française autour d’une serre de belle facture avec fontaines et bassins dont un devant la grotte qui abrite la statue en marbre d’une vicomtesse de Tocqueville. René de Tocqueville avait imaginé à la fin du XIXème siècle un système de mouvements d’eau très complexe avec moulin, turbine, bief, douve. Tous les soirs jusqu’en 1910 le château et ses abords se trouvaient ainsi superbement éclairés. L’ensemble est parfaitement entretenu, classé Jardin remarquable. Il sert de cadre tous les deux ans à la manifestation « Presqu’ile en fleurs » sorte de floralies et journées des plantes durant un week-end. Accès gratuit pour exposants et visiteurs.

Parc Emmanuel Liais
Maire de Cherbourg et astronome féru de botanique, Emmanuel Liais (1826-1900) profita de ses séjours au Brésil pour rapporter des plantes d’Amérique du Sud. Il en fit venir d’Asie aussi et aménagea un magnifique jardin exotique avec serres, bassin, fontaines. La maison est devenue musée. Le parc est public et on y rencontre de forts majestueux spécimens de plantes belles et rares. En mai les rhododendrons hauts de 4 mètres et plus sont couverts de fleurs. Il semble que le palmier Jubea spectabilis qu’on y voit soit le plus grand de France.

Et pour finir, comme il faut bien trouver une chambre d’hôte sublime à la mesure de l’événement, c’est au Manoir de La Fieffe, à La Glacerie, qu’il faut descendre. C’est la campagne calme à moins de 3 kms du port et de ses restaurants dont l’excellent La Satrouille où le chef Michel Briens cuisine légumes et poissons. Le Manoir de Fieffe offre trois chambres d’hôtes spacieuses et accueillantes. Le parc botanique en création sur 4 hectares est l’oeuvre d’Emmanuel de La Fonchais qui dans une vie précédente s’occupait de jardins en Seine-Maritime. Remarquables petits-déjeuners à base de fruits frais et de viennoiseries variées à la mesure du reste.

http://www.cherbourgtourisme.com
http://www.conservatoire-du-littoral.fr
https://fr-fr.facebook.com/fauconniere/
http://www.manoirdelafieffe.com

IMG_4017

UN NOUVEAU SOUFFLE A ROYAUMONT

IMG_8375

L’histoire de l’Abbaye de Royaumont court sur près de 800 ans puisque sa fondation est datée de 1228. Louis IX -le futur Saint Louis- et sa mère, Blanche de Castille, en sont les maîtres d’oeuvre. Richement dotée par le roi qui aime s’y retirer, elle connait un rayonnement immédiat qui ne dure pas en raison de la Guerre de Cent Ans et des famines du Moyen-Age. Nouveau souffle culturel depuis une dizaine d’années.

Déclarée « Bien National » en 1790, le nouveau propriétaire transforme l’abbaye en filature de coton en détruisant l’église dont les matériaux sont employés à la construction d’un village ouvrier. Après d’autres vicissitudes, on note l’arrivée de la famille Goüin qui l’acquiert et la restaure. Récompense avec son classement en 1927 aux « Monuments Historiques ».

Une vie de culture
Puis au fil du temps, différentes activités culturelles et musicales s’y développent et aboutissent à la signature d’un partenariat entre la Fondation Royaumont mise en place par les Goüin et le département du Val d’Oise en 1977. Parmi les activités, une nous intéresse particulièrement : la création d’un jardin d’inspiration médiévale en 2004. Ce lieu accueille depuis et pour des cycles de trois ans une exposition botanique qui permet d’illustrer ce que pouvait être le monde botanique médiéval.

Un thème nouveau tous les trois ans
Dans ce lieu nommé « le jardin des neuf carrés », la première exposition rassemble les plantes connues d’Hildegarde de Bingen, sainte et savante du Moyen-Age. Puis en 2007, c’est un voyage coloré dans le monde de la teinture végétale qui est proposé, suivi en 2010 du thème de la magie des plantes. En 2013, la collection « signes et emblèmes » amène à découvrir comment la symbolique des plantes, toujours vivante aujourd’hui, s’est intégrée à notre culture. Et enfin, celle qui se déroule entre 2016 et 2018, une nouvelle exposition végétale pour évoquer le voyage des plantes entre Orient et Occident aux temps anciens.

Une réflexion de paysagistes
Entre croisades, explorations de terres inconnues et échanges commerciaux, les migrations végétales au temps de Saint-Louis permettent d’aborder la notion de l’origine des plantes. L’exposition présentée par les paysagistes Olivier Damée et Edith Vallet oblige à nous interroger sur le métissage, la traçabilité, l’hybridation et les modifications génétiques des graines. Peut-on encore parler de nos jours d’espèces locales ?

Les jardiniers qui plantent et entretiennent …..
Lorsque les plans des jardins ont été acceptés, le temps de la mise en oeuvre est arrivée. Puis ensuite celui de l’entretien. Pour cela beaucoup de doigté et sens d’interprétation pour faire durer avec brio le cycle des trois ans. Deux jardiniers pour cela, dont Justine Marin seule présente le jour de la prise de vues. Elle explique son parcours :

« Un Master de design industriel en poche, j’ai bifurqué vers un tout autre métier, plus « terre à terre » : j’ai repris une formation en maraîchage biologique. Après quelques années à travailler dans une ferme ardennaise, je suis arrivée à Royaumont en même temps que le Potager-Jardin.Travailler aux jardins de Royaumont, c’est à la fois voyager dans le temps, différentes époques et différentes modes (jardin d’inspiration médiévale, jardin du cloître « à la française », parc XIXème, potager contemporain…). Ici les pierres sont plus anciennes que les arbres et une saison de jardinage parait alors bien furtive ! Cet étirement du temps est appréciable à Royaumont parce que cela laisse le temps de construire l’âme d’un jardin et imaginer son évolution sur le long terme. »

Et les plantes dans tout ça !
Au hasard des massifs, Justine est en mesure de renseigner les visiteurs sur les espèces rencontrées. Avec ses mots, voici l’histoire de cinq plantes :
La rhubarbe – Rheum x cultorum.
Venant de Chine, elle est importée en Europe par la route de la soie. C’était alors une plante rare et coûteuse. On l’utilisait pour ses vertus médicinales et ce n’est que beaucoup plus tard (vers 1800) que la rhubarbe est entrée dans notre alimentation.

La jacinthe des bois – Hyacinthus non-scripta.
Cette plante vient du côté atlantique de l’Europe. Au Moyen-Âge, la sève de ses bulbes servait à la confection de colle pour la reliure ou l’empesage des collerettes et fraises.

La Coriandre – Coriandrum sativum.
Originaire du bassin méditerranéen, C’est grâce aux Romains qu’elle voyage au Nord de l’Europe puis jusqu’en Asie. Aujourd’hui, l’Inde est le plus grand producteur de cette plante.

Le Chénopode – Chenopodium bonus henricus
Il doit son nom à Henri IV qui encouragea la création de jardins de plantes comestibles pour nourrir le peuple. Très consommée au Moyen-Âge, elle fut ensuite remplacée par l’épinard dans les habitudes alimentaires.

Le Rosier Musqué – Rosa moschata
Probablement importé d’Asie et Moyen-Orient, le rosier musqué est à l’origine de nombreux hybrides. D’abord en Espagne par les Maures, puis jusqu’en Angleterre au XVIème siècle.

https://www.royaumont.com
http://www.dvapaysages.com/fr-fr/accueil

IMG_8408