LE SALON DU LIVRE GOURMAND A PÉRIGUEUX

Périgueux confirme sa position de sanctuaire du bien boire et du bon manger puisque tous les deux ans, les années paires, son « Salon du livre gourmand » attire et réunit les producteurs et les consommateurs des saveurs qui réjouissent le palais.

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Et, comme son nom le laisse supposer, c’est bien sûr et surtout le rassemblement des auteurs qui écrivent sur le thème de la gastronomie. Ils sont là sous un grand chapiteau installé dans le centre ville, à cinq minutes à pied de la cathédrale, pour dédicacer leurs ouvrages, expliquer les contenus, souriants pour la photographie. Ce salon est un havre de paix où chacun, à sa mesure, communique et renseigne qui interroge. La presse couvre l’événement pour orienter les achats. La période de la fin novembre tombe à pic en se situant un mois avant Noël. Car le livre est un cadeau bien choisi qui ne se démode pas et fait toujours plaisir. Voici quelques ouvrages remarqués cette année entre les 23 et 25 novembre dans une fourchette de prix entre 10 et 50 euros.

Pour reprendre l’expression « A tout seigneur tout honneur » les premiers compliments vont à Pierre Hermé, président d’honneur du salon 2018, un patissier français au sommet de son art. Héritier de quatre générations de boulangers pâtissiers alsaciens, Pierre Hermé a commencé sa carrière à l’âge de 14 ans, auprès de Gaston Lenôtre. Célébré en France, au Japon et aux Etats-Unis, celui que Vogue a surnommé « Picasso of Pastry » a apporté à la pâtisserie goût et modernité. Avec le plaisir pour seul guide, Pierre Hermé a inventé un univers de goût, de sensations et de plaisirs. Son approche originale du métier l’a conduit à révolutionner les traditions les mieux établies. Eliminer, par exemple, les décors excessifs qui encombrent les pâtisseries, ou encore utiliser le sucre comme le sel pour trouver un assaisonnement qui permet de relever d’autres nuances de saveurs. En 2016, il a été nommé le meilleur pâtissier du monde par « The world’s so best restaurant ». Voici quelques auteurs rencontrés. Les libraires exposant leur offraient une hospitalité bienveillante.

Maïténa Biraben
Maïténa vit sur un écran de télé depuis 28 ans de la Suisse à la France, de France 5 à Canal Plus et plus encore. Quand elle en sort, c’est pour faire son marché et entrer en cuisine. Des amis, du vin et des petits plats, voici son credo. Elle présente dans son dernier livre « Légumes, ils vont vous surprendre », chez Marabout, les vertus et les saveurs des légumes au fil des saisons. Avec la complicité du chef basque Pierre Etchemaïté, elle propose des plats simples et savoureux, faciles à réaliser au quotidien, autour d’asperges, aubergines, betteraves, concombres, endives, panais, épinards et plus encore. C’est plus de cent recettes aux noms évocateurs : galette de poireaux, velouté de carottes pourpres ou encore la tarte tatin au fenouil confit et sauce chocolat !

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Claire Brachet
Conseillère oenologique et spécialiste des vins vegan, Claire Brachet est fondatrice de Double V, une entreprise de conseils en vins et cuisine végétale. Son « Guide Brachet des vins vegan et végétaliens » Ed. La Plage, donne du sens aux mentions vin bio, naturel, vegan… Dans ce guide des vins 100% raisin, on trouve une partie technique sur les méthodes de fabrication et sur les labels les distinguant. Et ensuite une centaine de vins sur 50 domaines français, toutes appellations confondues. En plus des notices de production et d’élevage des vins, Claire donne des notes de dégustation ainsi que des accords entre la cuisine vegan et le vin.

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Marc Veyrat
Faut-il présenter Marc Veyrat dont le directeur de l’Ecole hôtelière de Bellegarde dit un jour à son père que Marc ne serait jamais cuisinier ! Et il renvoya l’élève rebelle dans ses montages de Savoie. Cela tombait bien car il en adorait les paysages et les richesses. Sous le chapeau de feutre de son grand-père, il a réinventé la cuisine et a remis au goût du jour les saveurs de la terre. « Un chemin de fleurs et d’épines », chez Michel Lafon, est la première autobiographie d’un de nos chefs les plus emblématiques, une ode à une vie rugueuse certes mais pleine de bonheurs dès le départ.

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SUITE DU REPORTAGE SUR :  
http://www.claireenfrance.fr/Expositions-et-salons-15e-edition-du-Salon-du-Livre-Gourmand-de-Perigueux-1867.htm

http://www.aquitaineonline.com/actualites-en-aquitaine/dordogne/7867-perigueux-cloture-du-salon-du-livre-gourmand-2018.html
https://www.youtube.com/watch?v=8qhN8BLo5VY
https://www.theworlds50best.com/filestore/pdf/The-Worlds-Best-Pastry-Chef-Award-2016-French.pdf

HISTOIRE DE LA FORET DE LOCHES

Une des plus belles forêts domaniales françaises, la Forêt de Loches, a une histoire riche. Dans ses belles futaies de chêne et de hêtre, elle abrite de nombreux étangs. La richesse de sa faune et de sa flore lui vaut d’ailleurs d’être inscrite à l’inventaire des zones naturelles d’intérêt écologique, faunistique et floristique. Toutes ces raisons ont conduit Gaëlle Jacquet-Cavalli à enquêter et produire une étude qui ravira les historiens et les amateurs de culture générale.

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On peut se promener le nez en l’air en forêt pour regarder les feuilles et la cime des arbres qui se détachent dans le ciel. A l’inverse, à la saison des champignons, c’est plutôt l’observation du sol qu’il faut pratiquer. Cyclistes et joggeurs profitent autrement de la forêt puisqu’ils y trouvent calme et air pur pour assouvir leur passion. Et puis il y a la découverte de la forêt sous son aspect historique et économique. C’est ce que nous propose Gaëlle Jacquet-Cavalli, docteur en histoire de l’Université de Tours dans sa recherche « La forêt en Val de Loire aux périodes préindustrielles : histoire, morphologie, archéologie, dendrologie ». Elle nous emmène cet automne dans la Forêt de Loches et elle décrit pour les poètes, les curieux, les lettrés et un peu tout le monde mille années d’histoire locale. Ce sont les Editons Hugues de Chivré, basées en Indre-et-Loire à proximité de la dite-forêt, qui ont agréablement illustré et mis en forme son propos. En voici quelques extraits.

Propriétaires & usagers
« Le premier propriétaire connu de la forêt est le comte d’Anjou au XI° siècle. Il accorde à l’Abbaye de Beaulieu le droit d’y prélever son bois de construction et de chauffage et d’y nourrir cent porcs. Au XII° siècle, le comte d’Anjou devenu roi d’Angleterre (Henri II) donne 500 arpents à la Chartreuse du Liget  lors de sa fondation. Le roi demande aux moines de Villeloin de vendre la terre nécessaire à l’installation. En 1178, la fondation est confirmée et s’accompagne de la concession de toute la terre comprise dans le tracé des fossés. »
Photo de la page 39, Chartreuse du Liget.

P-39- La Chartreuse du Liget aujourd’hui

« Le seigneur de Montrésor a un droit d’usage pour le chauffage de son château (bois mort et mort bois), maintenu en 1526 d’après un acte de 1495. En 1550, son droit est limité à 6 cordes 2/3. En 1417, 120 arbres de la Forêt royale de Loches lui sont accordés pour bâtir et construire sa maison, sur montrée des verdiers et gruyers de la forêt. En 1498, il aurait à nouveau droit à 100 pieds d’arbres offerts par Charles VIII. »
Photo de la page 45, Château de Montrésor.

P-45- Chateau de Montresor

Activités en forêt et débouchés du bois
« Les archives du Château de Montrésor conservent un autre exemple de piège : un saut de loup aménagé par le comte Branicki dans les années 1870 près de son parc de Villiers. En poursuivant l’animal, on l’obligeait à sauter dans un enclos d’où il ne pouvait ni remonter ni s’échapper. Le système des primes permettait aussi d’inciter à la chasse au loup dont la liste est conservée pour le lochois en 1749-1750 et ….. De nombreuses primes sont versées à Chemillé-sur-Indrois, commune proche de la Forêt de Loches, mais le loup était partout présent dans la zone de Loches. »
Photo de la page 73, chasse à courre.

P-73- Chasse à courre

« La Tuilerie du Liget, qui a cessé son activité en 1939, est de construction plus ancienne. Cet établissement qui appartenait à la Chartreuse du Liget (commune de Chemillé-sur-Indrois), date au moins du XVII° siècle. Le four en son état actuel daterait du XIX° siècle. Le bail le plus ancien qui nous est parvenu date de 1645. Il est dit que le preneur pourra jouir de la maison et de l’ouche du lieu de la Buanderie comme son prédécesseur, ce qui prouve que la tuilerie est antérieure à cette date. »
Photo de la page 81, brique fabriquée à la Tuilerie du Liget.

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Forêt festive, forêt mystérieuse & loisirs
« Aujourd’hui la Forêt de Loches est un lieu de loisirs et de découverte : sortie pédagogiques et ludiques sont régulièrement proposées par l’ONF et les associations locales, et un cross country a lieu tous les ans à la Fontaine d’Orfonds. Il existe un sentier à thème, illustré par des panneaux expliquant les relations entre la forêt et les moines chartreux de l’ancienne Abbaye du Liget, un autre sentier avec trois stations permettant l’initiation des promeneurs au dessin nature : mobiliers de bois avec pupitres d’information spécialement conçus qui guident pas à pas les promeneurs pour apprendre à dessiner paysages, arbres et étangs qu’ils rencontrent. »
Photo de la page 91, cross country en Forêt de Loches.

P-91- Cross country en foret de Loches CPCL

Essences et peuplements
« En effet, en 1698, la forêt est dite être une chênaie, avec quelques hêtres. Les procès verbaux confirment cette interprétation. Les essences principales sont le chêne, le hêtre et le tremble (ce dernier dans des zones de la forêt moyennement ou peu denses, donc relativement dégradées). Le charme semble très minoritaire. On observe un développement du hêtre entre 1667 et 1790. C’est également durant cette période que la futaie se développe dans la forêt au détriment du taillis. »
Photo de la page 110, chênaie.

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Photos du Camera Photo Club du Lochois
www.huguesdechivre.fr

CONFRONTATION D’IDÉES ENTRE ARCHITECTES

Deux architectes, Jean Mus et Jean-Michel Wilmotte, têtes d’affiche des jardins pour Mus et des bâtiments pour Wilmotte, se sont rencontrés sur des chantiers et se sont appréciés, même si sur de nombreux sujets leurs avis divergeaient. Au point de faire un livre ensemble pour confronter leurs désaccords, avec Dane McDowell, animatrice du débat « lignes courbes contre lignes droites ». Publication des Editions Ulmer, octobre 2018.

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L’architecte de jardins Jean Mus a croisé la route d’un des architecte bâtiments parmi les plus connus de sa profession, Jean-Michel Wilmotte, et le temps les a liés profondément. Le premier dirige un atelier de paysage, Jean Mus & Compagnie, depuis Cabris, délicieuse petite cité provençale sur les hauteurs de Grasse. L’autre réunit tous les talents : académicien, architecte, urbaniste. Il est à la tête de Wilmotte & Associés, une structure présente dans les secteurs du luxe, de la culture, de l’hôtellerie et du tertiaire. Implantée à Paris, mais aussi à Nice, Londres, Séoul, Venise, elle fédère 275 collaborateurs de 25 nationalités qui oeuvrent aux quatre coins du monde.

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Grâce à des ouvrages de librairie édités ces dernières années, Jean Mus a eu l’opportunité de rencontrer Dane McDowell, une plume fleurie très à l’aise quand il s’agit d’évoquer le monde des jardins et de faire parler des jardiniers. Qui des trois a eu l’idée de confronter leurs points de vue sur l’art des jardins en composant un nouveau livre ? on dira que pour les trois personnages c’était devenu une évidence. Les Editions Ulmer viennent ainsi de publier leurs échanges, antagonistes à l’occasion.

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La recherche du beau les a toujours guidé l’un et l’autre. Et aujourd’hui encore, à l’apogée de leur carrière, ils se laissent volontiers surprendre et émouvoir par la simple beauté des choses : un paysage, un ciel nuageux, une oeuvre d’art, une musique, un grand vin. Curieusement, tous les deux ont gardé une fraîcheur et ce fameux don de l’émerveillement. Tous les deux défendent souverainement leur indépendance et ils n’obéissent à aucun diktat philosophique ou politique. Ils s’expriment avec des approches différentes, l’intellect et la rationalité pour l’un, la sensualité et l’émotion pour l’autre. Avec Jean Mus, le créateur doit exalter les particularités du site quand, pour Jean-Michel Wilmotte, la création d’un jardin oblige à repenser la rencontre de la nature avec un environnement construit. Si on les pousse un peu plus loin dans la réflexion, le jardin c’est la nature qui dialogue avec l’architecte pour Wilmotte alors qu’avec Mus le jardin est un tableau, car le jardin raconte à sa manière une histoire fusionnelle avec la nature. A titre d’exemples concrets, voici parmi beaucoup d’autres deux thèmes traités dans le livre.

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Tout surgit de la ligne ! Ce trait continu se réduit à sa longueur. Cette invisible épaisseur conduit le regard dans une direction déterminée et répond à une exigence : l’atmosphère du lieu.
Wilmotte.-  La ligne droite, c’est le réconfort du regard. Un de mes premiers coups de coeur est une promenade dans une allée forestière dont je ne voyais pas la fin. Dans le vocabulaire architectural, la ligne droite est l’unité et la mesure d’une abstraction formelle et la base d’un code personnel.
Mus.-  Pour moi, la courbe est le réconfort du regard, car elle est naturelle. D’ailleurs le corps humain n’offre au regard aucune ligne parfaitement droite. Les lettrés le savent, une belle écriture comportent pleins et déliés. Et comme le disait William Kent célèbre paysagiste du XVIII° siècle « la nature a horreur de la ligne droite ».

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Les parterres invitent le regard à s’arrêter sur un détail sans perdre de vue l’ensemble du jardin. Mus borde les allées de plantes vaporeuses pour adoucir les angles saillants de la pierre. Il utilise la couleur avec la sensibilité d’un peintre, en posant des aplats de mauve faits de champs de lavande qu’il fait onduler comme une étendue d’eau sous la brise. En toute logique, Wilmotte surligne les allées de bordures de béton lissé et préfère les topiaires géométriques et les alignements rectilignes pour accompagner son architecture.
Wilmotte tranche ainsi : « Ne comptez pas sur moi pour reproduire le salon des Floralies sur mes chantiers. J’aime les topiaires, les compositions géométriques élaborées avec des buis, des mousses et des pierres que l’on trouve dans les jardins japonais. »
Mus adoucit le propos « Les massifs nous renseignent sur le fil des saisons. J’aime travailler les moutonnements de petits arbustes comme les teucriums, les lauriers tin et les pistachiers lentisques, ou encore par des boules de santoline, de myrte et de romarin. Tous ces arbustes sont d’ailleurs parfaits pour remplacer le buis actuellement décimé par chenilles et maladies. Je préfère une symphonie de verts plutôt qu’une polychromie de fleurs. Mais c’est surtout le parfum qui m’intéresse et très souvent le paysagiste devient parfumeur. Ce sont alors des moments très délicats et jouissifs que je partage, entre autre, avec mon ami Jean-Claude Ellena, maître incontesté des rencontres olfactives. »

www.editions-ulmer.fr
minéral/végétal   35 euros
www.wilmotte.com
www.jeanmus.fr