La dernière gazette des parcs et jardins (n°41-avril 2019) éditée par l’Association régionale des parcs et jardins de Haute-Normandie www.arpjhn.net met en relief une dizaine de jardins, avec en point d’orgue le Jardin des sculptures de Bois-Guilbert qui se trouve à quelques kilomètres de Buchy, au nord de Rouen. Un adhérent de l’association, Jean-Luc de Feuardent, livre en six pages un texte poétique sur l’histoire du lieu, rédigé après un entretien avec Jean-Marc de Pas, son créateur.
En voici quelques passages pour accompagner mon reportage photographique effectué à Bois-Guilbert le 12 juillet dernier à l’occasion du vernissage de la 11ème biennale de sculpture. Car Jean-Marc de Pas est sculpteur et sur le vaste espace qui entoure son château de famille, il organise tous les deux ans une rencontre prestigieuse pour présenter son travail et celui de ses confrères créateurs et consoeurs.
« C’est là qu’une famille vit depuis près de quatre siècles. Elle fut fameuse en son temps, donnant naissance à Pierre et Thomas Corneille, Fontenelle, mais aussi à Pierre le Pesant de Boisguilbert, pionnier de l’Economie politique. C’est le grand-père de ce dernier qui fit construire en 1625 une premier manoir dont subsistent deux élégants bâtiments, proches du nouveau château construit sous Louis XVI.
« Imaginons maintenant un très jeune homme, Jean-Marc de Pas, qui en hérite en 1983. Il y a passé toute son enfance et reste habité par la poésie du lieu. Son esprit est vagabond, son imagination fertile, mais les idées ne suffisent pas : ses mains aussi se veulent créatrices. La nature est matière. L’argile du sol, le bois de la forêt ne peuvent-ils pas prendre vie, entrer dans le concert de ses pensées en une sorte d’hymne à la création ? Ainsi naquit le Jardin des sculptures de Bois-Guilbert. Jailli d’emblée et pour ainsi dire abouti d’un simple rêve de jeune homme.
« Les début ne sont jamais faciles… Que faire, sans le sou, d’une vieille demeure entouré de sept hectares de prairie à moutons ? Mais Jean-Marc sait où il va. D’entrée de jeu, il s’attaque à la grande allée périphérique de 800 mètres, recueillant dans les bois voisins des milliers de baliveaux qu’il plantera de ses mains, non sans rythmer savamment essences, tailles et couleurs. Il s’impose aussi une exigeante formation, depuis l’ébénisterie, la prestigieuse Ecole Boulle, les Beaux-Arts de Paris jusqu’au doctorat à La Sorbonne, sous la forme d’une thèse sur la création, qui se lit comme un poème….
« C’est en 1989 que Jean-Marc de Pas installe son atelier au coeur du domaine.Très vite, l’ancienne charretterie s’emplira de multiples formes, ébauches ou chimères fantasmagoriques. Près de soixante-dix sculptures viendront peupler le jardin, formant un ensemble unique de création paysagère. Chacune conçue dès l’origine pour telle niche, tel recoin, tel détour, éminence ou perspective… Le parc épouse les oeuvres comme les oeuvres structurent et donnent un sens au parc. » La suite du texte qui est à retrouver sur www.arpjhn.net donne envie de découvrir cette oeuvre remarquable, singulière et envoutante à mes yeux.
Un point d’histoire sous la forme d’une exposition sur Pierre Le Pesant de Boisguilbert (1646-1714) à partir de vingt panneaux présentés en extérieur dans le jardin
Economiste fondateur de l’économie politique moderne, il proposa une réforme fiscale sous Louis XIV et édita plusieurs ouvrages qui furent des succès populaires: « Le détail de la France » en 1695, un « Traité de la nature, culture, commerce et intérêt des grains » et le « Factum de France » en 1707. Ses ouvrages sont traduits dans plusieurs pays.
Petit-fils du fondateur du domaine familial à Bois-Guilbert, il y séjourna enfant puis construisit le Château de Pinterville où il s’installa sur les terres de son épouse en 1680. C’est son petit-fils Pierre-Augustin Adrien Le Pesant qui décida plus tard de remodeler le domaine à Bois-Guilbert en construisant l’actuel château en 1780 à l’emplacement de l’ancien Manoir d’époque Louis XIII. L’exposition permanente est installée sur le mur de l’ancien potager, bel appareillage en briques et silex datant de 1831 sur la perspective arrière du château.
Site labellisé « Maison des illustres » du Ministère de la culture pour la maison d’enfance de l’économiste restée depuis dans la famille.
Pour aller plus loin dans la connaissance de Jean-Marc de Pas :
http://www.jeanmarcdepas.com
http://www.lejardindessculptures.com
https://www.youtube.com/watch?v=dY5aWkGbAGc
