KATIA ASTAFIEFF TOUJOURS À L’AFFÛT DES PLANTES À HISTOIRE

Indéniablement Katia Astafieff aime les plantes et, par dessus, jubile de raconter à sa manière ce qu’elle en a appris par ses études, ses nombreux voyages et son travail de directrice adjointe des Jardins botaniques du Grand Nancy & de l’Université de Lorraine. Ces histoires, elle les a déjà narrées sur plusieurs livres dont « L’Aventure extraordinaire des plantes voyageuses » chez Dunod en 2018 traduit récemment en Italien. Son écriture est à la fois enjouée et sérieuse. Un botaniste peut la suivre sans crainte. Elle travaille ses sujets en profondeur et elle les fait relire avant impression par les spécialistes des sujets traités. Suivons la donc en confiance une fois de plus dans sa dernière production « Mauvaises Graines » : la surprenante histoire des plantes qui piquent, qui brûlent et qui tuent !

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Informés par quelques mises en garde, elle nous entraine dans un monde qu’on ne soupçonnait pas aussi dangereux : « Les plantes ont pour la plupart d’entre nous une image positive : elles égayent nos jardins, parfument nos intérieurs, nous nourrissent, nous soignent, nous habillent… Comment ne pas les aimer ? On oublie qu’il est aussi de terribles végétaux qui piquent, qui grattent… voire qui puent. Certains, comme les espèces envahissantes, peuvent également avoir des conséquences dramatiques pour la biodiversité ou la santé. Et les coûts pour s’en débarrasser sont parfois faramineux : tabac, berce du Caucase, cannabis, datura et quelques autres.» En voici sept accompagnées d’excellents portraits.

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Les plantes ont donc généralement une image très positive. Oui, mais… on oublie parfois que, en plus des végétaux qui piquent, qui grattent ou qui tuent, on en rencontre d’autres pas plus fréquentables comme le tabac qui provoque des cancers, le cocaïer qui rend dépendant ou même la canne à sucre qui peut nous enivrer après fermentation ! Beaucoup sont parfois canailles, fripouilles, polissonnes. D’autres produisent même des poisons mortels, comme le laurier-rose, le datura ou le colchique. L’Histoire, grande et petite, fourmille d’empoisonnements célèbres. Hannibal se serait suicidé avec de l’aconit et de la ciguë, Hamlet serait mort à cause de la jusquiame. Moins agressives, on peut évoquer les allergies causées par le feuillage de la berce du Caucase, et celles des pollens des bouleaux et ambroisies. Il reste une autre catégorie tout aussi ennuyeuse, celle des espèces exotiques envahissantes nommées « les invasives ». Deux exemples : Miconia calvescens à Tahiti qui menace la moitié des espèces endémiques de l’île. Et celui de la vigne maronne qui a des effets similaires sur l’Ile de La Réunion. Nous sommes donc loin d’une vision idyllique et naïve de la Nature à la Chateaubriand. Ainsi se déroulent les réflexions de Katia Astafieff dans ce livre plein de rebondissements.

Rafflesia arnoldii

Rafflesia arnoldii. Des plantes à l’odeur loin d’être alléchante et parfois surnommées « fleurs cadavres » ! On en trouve dans plusieurs familles botaniques comme ici avec les Rafflésiacées, les Aracées, les Apocynacées. On peut parler, au sujet de l’existence de ces différentes odeurs, de convergence évolutive. Ces familles ont en effet développé les mêmes adaptations et ont donc des caractères analogues.

Hedychium gardnerianum

Hedychium gardnerianum. Egalement appelé longose. Famille des Zingibéracées. Grandes plantes à feuillage très à l’aise dans les climats méditerranéen et océanique comme les Açores, où Katia les a rencontrés malheureusement non fleuris. C’est une sorte de gingembre à la magnifique floraison. Toutefois, si cette plante asiatique est jolie, elle a pris une place considérable dans les décors des jardins en raison de sa trop grande fertilité envahissante.

Amorphophalus titanum

AMORPHOPHALLUS TITANUM. C’est l’arum Titan, endémique de Sumatra, dont l’inflorescence qui sent particulièrement mauvais attire un gros coléoptère pollinisateur grâce à une odeur de cadavre ! Cette fleur en cornet peut atteindre 3 mètres de haut. Katia classe cet arum dans les «enquiquinants » car si vous le croisez vous ne serez pas forcément mis en appétit. Toutefois, il faut reconnaître que l’arum Titan est très rare au point d’être en voie de disparition. Lorsqu’il fleurit dans un jardin botanique, c’est l’événement. Trois jours maximum et les gens affluent pour ne pas manquer ce spectacle si haut en taille et couleur.

Arctium lappa

ARCTIUM LAPPA. La grande bardane. La photo que propose Katia pour illustrer son sujet montre à l’évidence comment les fruits de bardane s’accrochent aux vêtements et aux poils des chiens quand on se promène dans buissons et forêts. Les retirer est bien sûr travail de longue haleine. C’est l’essentiel de la peine que la bardane nous inflige. Par contre, gros avantage, c’est elle qui a donné l’idée à un ingénieur suisse, Georges de Mestral, vers 1950, de mettre au point le sytème d’attache « Velcro ». L’histoire est racontée dans ses détails.

Capsicum annuum

CAPSICUM ANNUUM. Le piment. Quelle est donc cette plante qui peut aussi bien enjoliver nos plats que nous brûler la gorge ? Réponse : le piment ou plutôt les piments. Katia raconte une émotion ultime vécue avec ce légume dans une petite cantine locale d’Inde du Sud en raison de sa violence gustative. La principale molécule responsable de la saveur piquante est appelée « capsaïcine », composé chimique qui appartient à la famille des alcaloïdes. Et si la plante synthétise cette molécule, ce n’est pas pas hasard. C’est pour la protéger de la prédation des animaux. Sauf des oiseaux qui y sont insensibles. Et qui favorisent, par leur consommation et le rejet des graines, la dissémination de l’espèce.

Ambrosia artemisifolia

AMBROSIA ARTEMISIIFOLIA. Plus connue sous son petit nom d’ambroisie, elle déclare à New-York en 1946 une rhinite si grave que le conseil municipal est contraint de lancer une campagne d’éradication. Double peine avec l’ambroisie à feuilles d’armoise. C’est une espèce américaine qui s’est multipliée au rythme de la croissance de l’agriculture industrielle et qui est arrivée en France dans le fourrage livré pendant la Première Guerre mondiale avec des chevaux destinés à l’armée française. Et en plus d’être invasive, car on la voit presque partout en Europe désormais, elle est aussi hautement allergisante. Katia dresse de cette plante herbacée annuelle un portrait redoutable que les personnes allergiques doivent connaître.

Taxus baccata

TAXUS BACCATA. La double vie de l’if vue par Katia Astafieff ! L’If est un conifère associé aux cimetières par sa sobriété, sa résistance aux maladies et la beauté de son feuillage toute l’année. Un if âgé de cent ans, c’est fréquent. Ceux de mille ans sont nombreux de par le monde. Katia « kiffe l’if » pour reprendre la conclusion des huit pages qu’elle lui consacre. Arbre de mort en raison de la dangerosité de ses feuilles et de ses graines en cas de consommation. Et aussi arbre de vie depuis une cinquantaine d’années par la découverte dans ses tissus d’une molécule, le « taxol » , possédant des vertus anti-cancéreuses. Une histoire passionnante !

Astafieff Katia Junip thur 800x

https://www.unitheque.com/mauvaises-graines/dunod/Livre/358332 Publication vers 18 mars 21 19,90 euros

Ci-dessus portait de Katia Astafieff au pied d’un Cupressus thurifera, dit aussi genévrier à encens, en région Queyras, près du village de Saint-Crépin.