L’IVRESSE DES COULEURS AVEC GÉRARD JEAN !

La consécration d’un nouveau jardin est une réjouissance. Au cours des deux dernières décennies est apparu le Jardin de Pellinec par Gérard Jean, en Bretagne. Comme cinquante ans plus tôt avait été mis en scène et entré dans la postérité celui de Kerdalo par Peter Wolkonsky. Ces deux créations sont comme des « Graal » pour les amateurs de jardins en recherche de beauté et d’inspiration. La préface du livre de Gérard Jean aux Editions Ulmer « Jardin de Pellinec » confirme mon propos. On la doit à Olivier Colin, éminent botaniste. Ses humanités accomplies, Olivier Colin s’est orienté vers le jardin en guise de distraction. L’homme est amusant et a pour autre plaisir de jouer avec les mots.

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C’est ce qu’il fait à propos du livre consacré au Pellinec quand il écrit qu’il eut été mieux approprié d’inscrire sur la plaque apposée à l’entrée plutôt « jardinier remarquable » que « jardin remarquable » distinction attribuée par le Ministère de la Culture. En fait, pour être plus précis, je dois dire qu’on aurait pu associer les deux formules. Ceci exposé, Le Pellinec, c’est quoi ? C’est un assemblage de talents réunis par un seul homme, Gérard Jean, excellent jardinier nourri par l’expérience de quatre jardins précédents, coloriste professionnel en raison de son activité de créatif au sein d’agences publicitaires, dont la sienne Jean & Montmarin, et hyper-actif. Gérard Jean semble en effet animé par une énergie rare. Son jardin de Pellinec (Côtes d’Armor), commencé en 1997, en est le témoignage tant il est riche, varié, beau et surprenant. C’est tout l’objet du livre dont voici quelques bonnes feuilles.

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Gérard Jean commence sa narration en expliquant comment il est tombé sur une annonce immobilière qui décrivait un peu son souhait, 4 ha de terrain avec une maison à restaurer les pieds dans l’eau. Le prix était bas et il ne savait pas ce que cela pouvait cacher.La visite qui a suivi a été déterminante car malgré l’abandon de beaucoup de déchets lié au fait que c’était une ancienne colonie de vacances il s’y est senti bien tout de suite en imaginant tous les jardins qu’il pourrait y faire. Le bâtiment principal était en très mauvais état, mais cela importait peu. Il ne voyait que son rêve car la terre paraissait riche à en juger par la taille des arbres et des ronces. De plus, les nombreux murets assez faciles à restaurer délimiteraient les parcelles du jardin projeté. La vue sur la mer paraissait magique. Pour la situer, la Baie de Pellinec se trouve entre Plougrescant et Perros-Guirec.

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Ces photographies extraites du livre montrent le jardin comme on peut le voir de nos jours. Visites possibles seulement les dimanches après-midi entre mai et août. Voir lien en bas d’article pour détails. L’essentiel du livre est écrit à la première personne. Je reprends donc les propos de Gérard Jean entre guillemets. « Quand on plante dans un nouveau jardin, même avec l’expérience, c’est toujours une surprise, bonne ou mauvaise. Avec le temps, on finit par trouver les plantes heureuses. Mais il faut des années. Alors, on essaie au mieux, en tenant compte de tous les paramètres comme l’exposition, souvent provisoire car changeante avec les arbres qui vont grandir. La drainage, essentiel pour le choix des plantes ! Le bon drainage n’est pas mieux que le marécage, c’est juste une question de plantes. La terre aussi est importante. Ici, elle est toujours assez acide et cela simplifie les choses. Certains endroits sont humifères avec une terre très riche et d’autres ont une terre très argileuse. Cela oriente le choix des plantes. »

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En sa qualité de jardinier expérimenté, Gérard Jean donne des indications de températures pour guider le choix des néophytes. Dans son repaire de bord de mer, les jours de gel sont rares. Voici quelques lignes qui évoquent la parcelle nommée le jardin anglais. « J’ai mis beaucoup de temps à aimer ce jardin. Les arbres choisis ont été longs à montrer toute leur beauté. Vingt ans plus tard, les Acer palmatum ‘Okagami’ et ‘Shindeshojo’ (-15°C) m’ont émerveillé par leurs belles couleurs douces, tant au printemps qu’en automne. L’Acer griseum (-20°C), aimé pour sa belle écorce, ses feuilles trifoliées et très colorées en fin de saison, vaut la peine d’être planté mais sa splendeur n’arrive qu’après de longues années. Le Davidia involucrata (-20°C), avec ses splendides mouchoirs (photo ci-dessus) demande 15/20 ans pour donner en grand nombre ses bractées si originales. »

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« Dans ce jardin, aucune place pour la terre nue. Le sol est entièrement recouvert de plantes vivaces, comme couvre-sol avec Epimedium, Hosta, Tiarella, Ajuga et Alchemilla. Ou comme fleurs avec Hemerocallis, Eucomis, Crinum powellii, Iris ensata, Agapanthus, Gaura, Echinacea et bien d’autres. Je recherche toujours le maximum de beauté avec le minimum d’entretien. Avec ces 4 ha de jardins, pas question que je sois débordé. Glen, l’arboriste, n’hésite pas à m’aider dès que le travail de mon côté devient trop important. Notre complicité contribue à la réussite du jardin. » Photo ci-dessus faite un 10 août avec Acacia vestita ‘Sainte Hélène’, Abelia ‘Edward Goucher’ et un massif de Crinum powellii.

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Réussite avec Iris ensata dans un marais envoûtant. Nous voici en présence sans aucun doute du jardin le plus personnel de Pellinec. « Dans un petit marécage envahi de ronces et d’arbres morts tombés, environ 2000 m2, j’ai tenté une mise en scène d’iris du Japon appelé Iris ensata. Dans d’autres de mes jardins, j’avais découvert cette plante avec émerveillement. Je savais que la floraison était longue et qu’ils poussaient en terre acide et humide. Pour le marécage, c’était une interrogation. » Suite du texte sur photo ci-dessus.

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« Les visiteurs me demandent souvent en quel mois de mai ou de juin fleurissent les Iris ensata. La réponse est juin. Mais personnellement je les préfère en mai quand tout pousse avec une exubérance inouïe, avec déjà beaucoup d’autres fleurs comme les arums et les Primula japonica. En 20 ans, ce jardin a peu changé, uniquement quelques petites améliorations. Les plantes elles-mêmes ont participé à la création de ce jardin. C’est souvent elles qui décident ou pas de s’installer. »

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Le jardin austral, une jungle extravagante. « Créé en 2004, ce jardin a tenu ses promesses. Le site choisi était une parcelle de 5000 m2, à l’abri du vent avec une terre acide assez riche et bien drainée. L’idée était de réunir des végétaux des terres australes qui demandent un pH de 6 avec une résistance au froid de -5°C et plus. J’ai imaginé ensuite un dessin pour installer les plantes de façon valorisante et originale. J’ai eu l’idée de construire deux grands cercles concentriques en pavés et entourés d’arbres protecteurs……. Ensuite, j’ai commencé à chercher les plantes indiquées sur mon plan. Au centre, des plantes xérophytes et, à l’extérieur, des plantes aux feuillages décoratifs…… Pour donner une ambiance très australe, j’ai d’abord choisi de nombreux eucalyptus résistants au froid. » La liste de ces derniers est longue. Gérard Jean fait de nombreux commentaires sur ses choix. Comme il donne en fin d’ouvrage dans une page de remerciements les noms des pépiniéristes qui l’ont approvisionné de tant de merveilles végétales.

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http://le-jardin-de-pellinec.fr/

https://www.editions-ulmer.fr/editions-ulmer/jardin-de-pellinec-l-ivresse-des-couleurs-810-cl.htm
35 euros
Octobre 2021

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