Quand une jardinière, finement lettrée, prend la plume pour évoquer un sujet qu’elle affectionne tout particulièrement, cela peut donner un livre qu’on ne va pas oublier au fond de la bibliothèque. Il restera en évidence à la portée de chacun pour être lu et relu longuement. « Mon jardin en hiver » de Snezana Gerbault parait avoir les qualités requises pour entrer dans cette catégorie.
L’hiver au jardin a été très longtemps considéré comme une saison triste jusqu’à ce que des auteurs anglais, jardiniers passionnés, aient traité ce thème avec des titres qui tournaient autour de « My Garden in Winter ». Le livre d’Edward Augustus Bowles, en 1915, fut l’un des plus célèbres. Celui de Rosemary Verey, publié en 2002 par l’éditeur Frances Lincoln, informa les jardiniers sur l’art d’explorer la richesse renouvelée des plantes remarquables sous le vent, la pluie, le froid. Parallèlement, dans son jardin Vasterival, en Seine-Maritime, Greta Sturdza éduqua des milliers de visiteurs dans le but de les initier aux techniques de jardinage qui rendaient l’hiver sympathique en présentant sa collection d’hellébores roses de noël nichées au pied des écorces rouges de certains cornouillers taillés selon sa longue expérience.
Aujourd’hui, c’est Snezana Gerbault qui a pris la plume et son appareil photo pour étudier et relater le sujet à sa façon. Elle a la chance de travailler occasionnellement au Museum national d’Histoire naturelle de Paris et, par complicité, le directeur du Jardin des Plantes a rédigé pour son ouvrage une préface engageante. L’avantage de consulter un livre récent porte sur la présentation de plantes mises nouvellement sur le marché. Et ces dernières sont nombreuses tant les fêtes et journées des plantes qui se tiennent un peu partout sont des lieux d’exposition de nouveautés, en sachant que la demande des acheteurs entraine des efforts de recherche de la profession horticole.
Snezana présente bien sûr les grands classiques. Qui entre décembre et février peut rester insensible aux fleurs miniatures d’hamamélis posées sur ses tiges tels de petits papillons ? C’est un arbuste dont la taille adulte évolue entre 2 et 3 mètres en tous sens. Pas de maladie à craindre, pas de caprice de culture ! Voici un végétal qui est très à l’aise dans les brumes hivernales du nord de la Loire et dont depuis plus de trente ans on a pu vérifier ces caractéristiques. Plus classique et très connu, le Physalis dont les fruits enveloppés dans une sorte de carapace orangée le font nommer « amour en cage ». Cette production proche du papier si mince et translucide en hiver l’a rendu populaire. Au fil des jours froids, l’orange tourne au sépia, puis au blanc. Le final peut être ravissant car la cage devient transparente. Et gardons nous d’omettre aussi les nombreux mahonias, à l’architecture étonnante et leur crête jaune.
L’auteur a fait son marché de découvertes pour enrichir la palette. Elle explique l’attrait de chacune des espèces présentées. D’abord sous son angle botanique, puis son comportement au jardin et les soins à lui fournir quand il y a un régime particulier à observer. Enfin l’intérêt ornemental. Car beaucoup des plantes qui nous font vibrer en hiver ont besoin d’être présentées sous cet angle. Prenons le cas des hortensias pour rester facile à comprendre. La grosse inflorescence de l’hortensia peut être coupée quand elle commence à faner si l’on pense que cela fait plus propre. Et pourtant ! on peut garder les plus gaillardes des car elles vont sécher sur pied et offrir pendant des mois un spectacle de fleurs sèches altières du plus bel effet.
C’est ainsi qu’on part à la rencontre des Berkheya, Acantholimon, Miscanthus, Stipa, Calamagrostis, Molucella pour alimenter le rayon feuilles séchées. Côté arbustes à écorces brillantes qu’on voit de loin, on découvre saules, ronces, cornouillers. Sans oublier les espèces à fruits décoratifs plus ou moins durables. Le choix est vaste avec les Malus (pommiers d’ornement) et les sublimes Callicarpa. Un rappel est sonné par la présentation d’une quantité de petites plantes bulbeuses qui exhibent leurs fleurs comme des moquettes multicolores. C’est du côté des crocus, perce-neige et narcisse qu’on trouve les meilleurs effets. Pour terminer en beauté, Snezana est allée à la rencontre de Stéphane Chapelle un fleuriste parisien bien connu pour ses compositions d’automne-hiver. Un excellent final tout en finesse et émotion.
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Mon jardin en hiver septembre 2017
19,90 euros